- Lettre d'information du 1er mai 2004 -
Fête du travail ?
ASCO : coordination : Pierre Dherte - ( $compteur abonnés )
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EDITO : Le maillon faible ! (1) Bonne fête du travail à tous ! (hum ... pardon !) À l'heure où certains responsables politiques nous montrent de savants camemberts et d'éloquentes courbes atteignant d'irrésistibles sommets vers des finances en hausse ; à l'heure où les briques culturelles se multiplient ici et là, on a jamais vu aussi peu d'emplois pour les comédiens dans le secteur des arts vivants mais surtout dans celui de l'audiovisuel et du cinéma. C'est à se demander où iront tous ces acteurs, ces techniciens, ces auteurs et ces réalisateurs sortis chaque année de la douzaine d'écoles de notre communauté. Encore un record du nombre ! De plus, malgré un effort qui semblait se dessiner avec de bonnes paroles du style "croyant sincèrement au talent de nos comédiens et techniciens, soyez assuré que nous sommes les premiers à les faire valoir dès que possible", on voit encore, ça et là, certains salaires approchant l'indécence. En effet, le fait d'oser nous proposer 293 € brut pour deux jours de travail en prétextant que c'est probablement le seul moyen de faire travailler des comédiens belges dans des séries télé démontre le seuil inégalé de notre triste sort en matière d'emploi et de rémunération dans les productions télévisuelles locales. Quant au cinéma, on a pu voir en 2003 une seule production majoritairement belge, à savoir, "L'autre" (titre évocateur ?) de Benoît Mariage. "Les télévisions sont le maillon fort du Financement du cinéma européen" (Le Monde, le jeudi 13 mai 1999). "La RTBF" est une chaîne nationale, mais elle ne produit aucune fiction méritant ce nom, c'est véritablement une exception européenne" (Le Soir, le mardi 7 mai 2002). Nos responsables de chaînes seraient-ils donc enclins au rattachement à la France ? Quant on constate que 85% du budget téléfilm de la RTBF est aujourd'hui essentiellement orienté vers des productions françaises, il y a effectivement de quoi se poser des questions. Alors que les sondages mettent en évidence la chute des taux d'écoutes et le net glissement des téléspectateurs bruxellois et wallons vers ... TF1 (tiens donc !), nous continuons à être inondé de téléfilms étrangers. En Flandre cependant, au Canada et dans la plupart des pays européens, les chaînes proposent un contenu majoritairement local aux heures de grande écoute (entre 18h30 et 23h). Chez nous, en prime time, pour la semaine du 24 avril 2004 et uniquement concernant les téléfilms, on peut naviguer entre Navaro (téléfilm français, 24/04, 20h50, RTBF1), Fausse piste (téléfilm américain, 24/04, 20h45, AB3), Inspecteur Barnaby (téléfilm anglais, 24/04, 20h40, RTL), Six pieds sous terre (série française, 24/04, 20h30, ClubRTL), L'instit (téléfilm français, 25/04, 20h50, RTBF1), Un téléfilm canadien (20h15, RTL), Fabio Montale (téléfilm français, 28/04, 21h05, RTL), Julie Lescaut (téléfilm français, 29/04, 20h25, RTBF1), Chapeau melon et botte de cuir (série anglaise, 29/04, 20h20, RTBF2) et enfin, l'inénarrable Inspecteur Morse (téléfilm anglais, 30/04, 20h15, AB4). Les auteurs et les comédiens belges souhaitent exprimer leur indignation face à cette situation qui perdure depuis 20 ans et où les chaînes publiques et privées de la Communauté française (RTBF, RTL-Tvi, CANAL +, AB3, AB4) demeurent le maillon faible du financement de l'audiovisuel et de la création, se faisant sans auteurs ni comédiens belges ! Nous avons rencontré le Ministre Chastel et nous lui avons communiqué ce manque à gagner. Nous lui avons également rappelé que la télévision, le cinéma et le théâtre sont maintenant intimement liés et que le manque d'emploi flagrant dans le plus médiatique de ces secteurs influencera inévitablement et négativement les deux autres ! Cet état de fait nous conduit peu à peu à l'étouffement de notre culture, de notre identité et de notre communauté que nous sommes obligés d'exporter pour obtenir quelque reconnaissance (de plus en plus évidente ailleurs que chez nous !). Plus urgent encore que des moyens financiers supplémentaires, il s'agit ici et avant tout de soulever un véritable débat sur ce manque de responsabilité, de respect et d'audace en matière culturelle et plus particulièrement concernant la reconnaissance et l'emploi de nos artistes francophones dans la production télévisuelle. Certains parlent même de la "nouvelle censure", celle qui s'opère à travers les moyens financiers, à travers la pression économique et à travers cette volonté d'uniformisation de la pensée. On ne veut plus prendre de risque nulle part et rester sur une ligne médiane dans laquelle tout le monde peut se retrouver. Les risques, ce sont aux investisseurs privés à les prendre et on fait tout pour les y aider, eux ! En effet, le mécanisme du Tax Shelter s'ouvrira bientôt aux téléfilms, incitant les investisseurs à miser sur un marché qui nous concerne tous. Mais force est de constater qu'étant donné la situation actuelle par rapport à l'emploi des comédiens belges dans les téléfilms belges; étant donné également que ces fonds pourront être destinés en toute légalité et intégralement au paiement, par exemple, du salaire de stars françaises, l'ASCO s'est exprimée à la Chambre lors d'un débat fédéral en signalant sa grande inquiétude et son souhait de voir s'établir au plus tôt des garde fous destinés à protéger notre secteur en la matière. Nous avons été entendus et compris au fédéral car l'ouverture aux téléfilms sera effective dès le 1er janvier 2006 mais à la condition obligatoire d'accompagnement d'Arrêtés Royaux destinés à baliser et à encadrer toute dérive ou effet pervers comme cité plus haut. J'ai également fait acter, lors de la dernière séance plénière du Comité de Concertation de l'Audiovisuel et du Cinéma que soient dorénavant stipulés dans les récapitulatifs annuels des bilans des films de la Communauté française, les noms et le pourcentage des comédiens francophones participant aux coproductions et productions belges, ce qui n'était pas le cas. On comprend aisément pourquoi !
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